• Écrire, une thérapie

    Écrire, une thérapie

    [Photo : Daniela D'Andrea]

     

    J'ai commencé à écrire très jeune, j'avais pas plus de huit ans. Je me souviens que tous les mercredis et week-ends, je me levais tôt, bien avant que le monde se lève et je partais. Je me rendais à la rivière près de chez moi et je m'installais sur les cailloux assiégés par l'eau. Tu m'aurais vu, les bras levés pour protéger mes feuilles volantes, de l'eau jusqu'à la taille et ce sourire débile aux lèvres pendant ma traversée. 

    C'était dangereux et c'est ce qui a fait que c'était exaltant. C'était mon plus beau rencard. L'eau pouvait m'emporter aussi sûrement que mes pensées et j'aimais cette sensation d'être vulnérable, là, ici, comme ça, et plus encore quand je commençais à écrire avec le grondement de l'eau emplissant mes oreilles. Ça anesthésiait le vacarme de mes pensées pendant que mon stylo en accouchait douloureusement. J'y ai écris beaucoup de choses et j'en ai brûlée beaucoup aussi. 

    J'écrivais toutes ces choses qu'on avait jamais le temps d'écouter et peu à peu, j'ai arrêté de vouloir en parler. J'ai confié tout ça, à cet endroit, sur des feuilles vierges. Je me suis renfermée, effacée, tenue en secret. C'est clairement la solitude qui m'a poussé à écrire, à vouloir en vivre aussi. On dit qu'écrire ne sauve pas. Diantre que c'est faux, sans les mots, je me serais tuée plus d'une fois. 

    Puis bien des années plus tard, l'écriture ne m'a pas quitté. Mais bon, il paraît qu'il fallait que j'en parle à un professionnel. Alors j'ai vu un psychiatre, puis un autre. Ça n'allait pas, je ne pouvais pas, ne voulait pas. Peut-être parce que j'ai toujours pensé que personne ne pouvait sauver personne. On se sauve soi-même, on décide de le faire ou non. Clairement ma thérapie, ça a toujours été une page blanche et quand la séance est trop dure, je brûle le papier. Ça a été une façon pour moi d'exorciser mes démons. D'y faire face. Seule. 

    Quand on recule trop en soi-même, que ce soit forcé ou non, on ne peut plus revenir vers les gens. Quelque part, on apprend à s'auto-suffire. C'est pour ça, tu vois, qu'on est proche de moi qu'avec beaucoup de distance. Comme si je n'avais jamais quitté ces rochers où j'ai décidé de me protéger du monde et plus particulièrement des êtres humains.

     

    Le 18/10/2015.

     

    Malia Rigazzo / Texte protégé - Tous droits réservés.

     

    Écrire, une thérapie


  • Commentaires

    3
    Mardi 10 Janvier 2017 à 14:32

    Waw... C'est superbe et tellement vrai...

    2
    Mardi 11 Octobre 2016 à 21:27

    C'est un putain de texte qui me parle tellement... Et oh que oui l'écriture est une sacrée thérapie, bien plus efficace que n'importe quel professionnel. Une bulle protectrice, un besoin. Parfois on passe pour asocial, car s'approcher de nous est difficile ; mais f*** tous ces juges ignorants.

    Enfin bref super texte, un véritable miroir.

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